N’en déplaisent aux sceptiques, la frontière entre maladies physiques et maladies mentales est ténue. Certaines croyances, émotions ou expériences passées peuvent créer des maux psychosomatiques ou aggraver certaines maladies si l’on n’y prend pas garde. C’est la raison pour laquelle la collaboration entre médecins et psy est clé.
Voici quelques éléments de réflexion à ce sujet, tirés de mon expérience.
Les médecins : les lanceurs d'alerte pour les troubles psychologiques ou psychosomatiques
Les médecins traitants sont souvent les plus habilités à recommander une consultation chez le psy. Leur approche étant généraliste et leur accompagnement dans la durée, ils sont les premiers à distinguer les troubles physiques ayant une cause physique réelle et les troubles psychosomatiques. Ce sont eux qui orientent vers les spécialistes et sont informés par les spécialistes ou les patients eux-mêmes des résultats d’examens.
Les cas pour lesquels ils recommandent le plus souvent des consultations chez le psy sont liés aux dépressions ou burn-out, mais aussi aux troubles alimentaires (boulimie, vomissements, anorexie) ou certains troubles psychosomatiques impressionnants pour le patient, qui donc consulte (attaques de paniques, pelades ou zona sans cause identifiée par les cardiologues, dermatologues, neurologues ou autres spécialistes).
Le lien au psy est plus rare pour des troubles plus « cachés » ou « mineurs » : hypocondrie, insomnie, lumbago ou torticolis répétés, ou d’autres troubles psychosomatiques moins courants : vertiges, acouphènes, eczéma, fibromyalgie, troubles sexuels, encore une fois sans cause physique détectée par les kiné, ostéo, gynécologues, ORL ou dermatologues…). Il faut donc l'encourager.
Certains cas psycho-thérapeutiques, plus complexes, interrogent les médecins traitants ou psychiatres par leur intensité ou durée.
Par exemple, certains cas de « burn-out ». En creusant, il s’avère souvent que ces burn-out masquent des dépressions sévères. Même si le patient ne mentionne avec eux que le stress au travail, d’autres désillusions du passé reviennent en force et expliquent que leur barrage de tristesse, de colère ou de peur déborde violemment. Cela peut être les deuils ou maladies de proches, en cours ou anciens mais non traités, des gros problèmes de couple ou de relations parents-enfants qui résonnent parfois avec la séparation de leurs propres parents quand ils étaient enfants, la multiplication de troubles anxieux qu’ils n’ont jamais osé avouer au médecin (TOC, phobies multiples, difficultés sexuelles…).
Certain(e)s patient(e)s cumulent les soucis (dépression, addictions, attaques de paniques, TOC…) et cela peut complexifier le diagnostic et le choix de la stratégie. Dans certains cas, je peux choisir de partir des attaques de paniques ou au contraire des TOC. Je peux choisir de rester très ancrée sur les problèmes présents avant de commencer à repartir dans le passé (c’est souvent le cas) et parfois pas (il existe des techniques régressives sous hypnose).
J’ai choisi de me former à la thérapie stratégique systémique de l’Institut Gregory Bateson, représentant officiel du Mental Research Institute en Europe, pour son efficacité sur certains troubles "résistants", en dehors de son apport passé au traitement de certaines schizophrénies et paranoïa (« théorie de la double contrainte » de Grégory Bateson).
Même sur les troubles historiquement « résistants » comme l’anorexie ou les TOC, il existe désormais des techniques ou protocoles d’intervention beaucoup plus ciblés, dont les taux de succès ont beaucoup progressé (voir l’article https://www.carole-aubert-psy-coach-paris.com/2017/09/03/comment-se-débarrasser-des-toc/).
Il faut rester vigilant face au burn-out des soignants
Il est triste de constater que les médecins et les psy sont souvent les « cordonniers les plus mal chaussés ». Ils sont eux-mêmes sous pression et plus sujets que la moyenne au burn-out. L’enquête « Santé Et Satisfaction des Médecins Au travail », ou enquête SESMAT, menée en 2008 auprès d’un échantillon représentatif de médecins de toutes spécialités des hôpitaux publics français (1924 répondants dont 179 psychiatres), a mis en lumière un taux potentiel de burn-out de plus de 42% auprès de l’échantillon et des psychiatres (52% chez les femmes psychiatres). La pression temporale, l’impact de leur travail sur la vie de famille, la solitude face à la souffrance des patients et la perte éventuelle de sens dans leur travail peuvent fragiliser les soignants, parfois sans qu’ils s’en rendent compte (Michel Delbrouck, « Burn-out et médecine. Le syndrome d'épuisement professionnel », Cahiers de psychologie clinique 2007/1 (no 28)).
Comment se gérer soi-même en tant que thérapeute?
Mon entourage me demande souvent comment je fais pour bien gérer mon humeur et mon énergie sachant que je reçois toute la journée des gens qui « vont mal ».
Pour moi, c’est simple. J’ai été suivie (et très bien suivie !) par le même médecin traitant de mes 6 ans à mes 42 ans. Il est malheureusement parti à la retraite mais j’espère retrouver quelqu’un d’aussi compétent et bienveillant.
Pour mon énergie, je suis suivie par un acuponcteur tous les trimestres, et plus, en cas de besoin.
Malgré mes nombreuses années de travail sur moi, il peut encore m’arriver d’avoir ponctuellement des soucis. Je consulte alors une consoeur psy formée à la même approche que moi, puisque je la juge efficace.
Enfin, concernant ma pratique et mes patients, je suis supervisée par les praticiens plus expérimentés que moi à l’institut Grégory Bateson.
La thérapie stratégique systémique étant considérée par certains aspects comme une thérapie « paradoxale », il faut choisir les bonnes techniques, les bons exercices et surtout faire en sorte que le patient et son entourage (dont médical) tiennent le cap. Cela peut supposer d’échanger avec son médecin traitant ou son psychiatre car certains exercices, redoutablement efficaces, sont surprenants. Le bon protocole, donné au mauvais moment ou bloqué involontairement par l’entourage, peut en effet me ralentir. Certains patients dont la thérapie avance moins vite que prévu bénéficie donc de ces supervisions sans le savoir. De toute manière, pratiquant des thérapies dites brèves, je vois l’impact de mon accompagnement sur les patients relativement vite (en moyenne entre 5 et 10 séances). Je n’ai pas que des patients en grande souffrance. J’ai aussi des patients qui ont repris espoir ou vont beaucoup mieux, notamment ceux qui achèvent la thérapie.
J’espère que cet article vous aura appris des choses sur mon métier et ma pratique.
En tant que patient, pensez à mentionner lors de vos consultations vos troubles physiques, mêmes « mineurs » qui peuvent m’aider à vous aider.
En tant que médecin, n’oubliez pas de faire le lien à une approche psychothérapeutique pour les troubles « cachés » ou « mineurs » tels que l’hypocondrie, l’insomnie, les lumbago ou torticolis répétés, mais aussi d’autres troubles psychosomatiques moins courants : les vertiges, acouphènes, eczéma, fibromyalgies ou troubles sexuels, encore une fois sans cause physique.
Si vous souhaitez consulter, n’hésitez pas à prendre RV.
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Carole Aubert, Cabinet paramédical au 1er étage, 71 boulevard de Sébastopol, 75002 Paris